
Internet a été ouvert au peuple chinois en 1995, l’année suivante a été labellisée « l’année de l’internet » mais seule une petite élite était « connectée ». Avec le développement d’un classe moyenne à la fin des années 90, les chinois ont commencé à avoir accès a l’éducation, et l’internet s’est peu a peu démocratisé au début des années 2000. En 2024 on comptait plus de 1,1 milliard d’utilisateurs en Chine soit près de 80% de la population chinoise. Cette ouverture sur le monde permettait au peuple chinois de se forger une opinion, d’analyser les informations, d’en discuter le contenu, et de communiquer d’une manière jusqu’alors inédite dans le pays. Mais, devant le potentiel de diffusion d’idées nouvelles inhérent à ce nouveau mode de communication inédit en Chine, les autorités chinoises ont décidé d’instaurer des mesures visant à en contrôler l’utilisation.
Dès sa nomination à la tête du « Parti-État » en 2013, le président Xi Jinping a mis fin aux quelques années de pluralisme naissant en s’attelant à une purge de l’internet. Ainsi, le régime s’est employé d’abord à discréditer et à jeter en prison les principaux opposants et défenseurs des droits humains oeuvrant sur les réseaux, et, à leur suite, les cabinets d’avocats qui les défendaient, puis les avocats qui défendaient ces avocats… Les moyens adoptés par le gouvernement à cette fin sont divers et nombreux : multiplication des règlements ; fermetures de cybercafés, des moteurs de recherche, de certains sites étrangers et de sites politiquement sensibles … et surtout, la mise en place d’un système de filtrage des recherches sur le web, à partir d’une liste de mots-clés et de termes prohibés. Par exemple, en chine, Netflix n’est pas disponible, WeChat remplace WhatsApp… .

Les témoignages rapportent des scènes de la vie quotidienne en Chine : « Il arrive que l’on constate soudain, pendant un chat, que la discussion perd toute espèce de sens : c’est que certains termes sont effacés automatiquement par WeChat dans les échanges entre l’émetteur et le récepteur sans qu’aucun des deux n’en ait été informé. » Les listes de mots interdits sur les réseaux sociaux sont actualisées chaque jour par les autorités de la censure de Pékin, tel le roman de George Orwell. Par exemple, en 2018, quand la Constitution a été reformée [pour permettre à Xi Jinping de devenir président à vie], la liste des mots interdit allait de « accession au trône » et « louez l’empereur » à « Winnie l’ourson », qui avait été utilisé pour désigner le chef de l’État en contournant la censure.
Qualifiée de « cybercrature » par Emmanuel Lincot, ce dernier met en garde sur l’accélération totale de cette pratique depuis la pandémie de Covid-19. En effet, le coup de massue final a été la pandémie : « Sous prétexte sanitaire, la population est encore plus contrôlée et les données collectées encore plus importantes », nous affirme-t-il.
En Chine, il n’y a pas une censure mais des censures, en ligne et hors-ligne, sur internet et dans la vie quotidienne. Les 1,4 milliard de Chinois ne sont pas surveillés de la même manière : les voix dissidentes feront bien sûr l’objet d’une attention accrue.
Enfin, il est important de noter que cette censure n’est pas seulement automatique et que derrière se cache des « milliers de petites mains » qui censurent la toile.
Alors, demain la Chine : dictature ou démocratie ?
Une thèse communément admise voudrait que le développement d’une classe moyenne, entraîne tôt ou tard une démocratisation de son régime politique et une évolution plus ou moins douce vers la démocratie. Selon Jean-Pierre Cabestan, le faible encrage de l’esprit démocratique, autant auprès de la population mais également auprès des élites, appuyé par le désintéressement des masses chinoises de la politique rendent compliqué un changement de mentalité malgré le développement d’un classe moyenne en Chine.
La faute à qui ? Au niveau macroéconomique le gouvernement a su démontrer sa capacité a favoriser le développement économique de la Chine (même si ce processus a été réalisé par les chinois eux-memes, entreprenariat), et a « améliorer le bien être des habitants » en maintenant une « stabilité politique ». Au niveau microéconomique l’habitant « Chinois moyen » regarde que son niveau de consommation a augmenté ainsi que son espérance de vie et que en conséquence les « choses vont bien ». Alors pourquoi les choses devraient elles changer… Mais ce pouvoir autoritaire est il soutenable au long terme ?
Arthur NUTTE PLENT Sources : Amnesty, Ouest France, « le dessous des cartes » Arte, courrier international, LeMonde, FranceInfo, Les Echos, Pascal Boniface ©

