03 – Le rouge et le noir | Stendhal [A]

Chronique initialement publiée en juin 2020 sur Radio Thierry Maulnier, à retrouver ici:

03 – Le rouge et le noir | Stendhal

Oyez, Oyez, cher lecteur, chère lectrice, amoureux des mots ou brebis égarée, je te souhaite la bienvenue sur cette nouvelle édition de Libri Chronique !
Aujourd’hui je me penche sur une pièce maîtresse de la littérature française et du XIXème siècle, sur une œuvre à la fois polémique, satirique, rocambolesque et curieuse, à la fois réaliste et ponctuée d’invraisemblable, d’une psychologie louée par Friedrich Nietzsche lui-même, considérée par certains comme l’un des plus grand chef-d’œuvre du monde des Lettres et qui connaît encore de nos jours un succès colossal ; tu la connais, cela ne fait pas le moindre doute : il s’agit du fameux roman Le Rouge et le Noir.

Henri Beyle, aussi connu sous le pseudonyme de Stendhal, un écrivain réaliste et romantique majeur de l’époque, aux côtés d’Hugo et de Zola, pour n’en citer que deux, fait paraître en 1830 son second roman, Le Rouge et le Noir. Ce qui est intéressant, c’est que toute l’intrigue est construite autour d’un fait divers ayant été à la Une de nombreux de journaux parisiens ; autour d’une histoire à la hauteur des aspirations et du style de son auteur, presque impérieuse, et qui à la genèse d’un très grand succès.  Le Rouge et le Noir, c’est l’histoire exceptionnelle de Julien Sorel, fils d’un riche paysan de Verrières, une petite ville provinciale ; jeune homme cultivé et débordant du désir d’apprendre, méprisé et violenté par sa famille qui ne voit en lui qu’une créature faible et sans avenir. Dans la première partie du roman, Julien devient le précepteur des enfants de Monsieur de Rênal, le maire de la petite ville, et rencontre sa femme, Louise de Rênal, un être doux et maternel, naïf, gracile, qui va faire naître en lui une passion dévorante, ultime point de départ d’une course à la gloire et à l’ambition à l’issue funeste. De Verrières et de sa liaison avec Mme De Rênal, Julien ira au séminaire, tiraillé entre son idolâtrie pour Napoléon Bonaparte, dans une France à la politique déchirée et changeante, et ses aspirations religieuses, puis entrera au service d’un Marquis, à Paris, dans la seconde partie de l’œuvre, où il entamera une seconde passion tumultueuse avec la jeune Mathilde…
Le Rouge pour l’armée, la passion amoureuse, la violence de son caractère et son ambition ; Noir pour sa soutane d’ecclésiastique, ou pour la mort ; les lumières de l’auteur manquent aux conjectures et au mystère de ce titre, qui reflète pourtant parfaitement les enjeux de la vie du jeune Sorel.
Ce qui captive dans ces lignes, c’est la psychologie étoffée et précise des personnages ; sous la plumes de Stendhal, ils sont disséqués, mis à nus ; le lecteur pénètre dans leurs âmes et leurs tourments, et pourtant, une aura d’insaisissable persiste… Julien, c’est l’orgueil, l’aspiration  démesurée à l’élévation sociale et intellectuelle en contradiction avec un mépris ironique et satirique de cette bourgeoisie de province et cette noblesse de Paris où il évolue, Julien est hanté par une sensibilité exacerbée et violente, par ses désirs changeants, son zèle passant d’un extrême à un autre, pris entre la confusion de l’amour et de la gloire…

Cher lecteur, chère lectrice, il y tant à dire mais trop qu’il me faille taire, car je ne voudrais pas gâcher ta découverte ; il te faut plonger dans ce roman et te laisser pénétrer par sa justesse, sa
fatalité et sa poésie provocante ; rire aux moqueries de l’auteur et à sa connivence avec Julien, garder le souffle suspendu jusqu’à la fin ; la fin magistrale, la fin éclatante qui dérange et qui apaise les nerfs éprouvés par la lecture achevée…
Le style piquant et sans fard de Stendhal fait honneur à une histoire qui ne fait fi d’aucune limite ni d’aucune honte ; lecteur zélé, tu te sens épuisé par ces histoires sans conclusions, où les amours n’aboutissent ni à la chair ni aux aveux, et tu me demanderas : Le Rouge et le Noir ?
Oui, oui, sans préambule, sans hésiter, pour s’enivrer d’un peu de génie et… beaucoup d’impétuosité.

~ générique.