
Nous, élèves de classes ayant choisi géo-politique, avons eu l’honneur de rencontrer en présentiel Monsieur Kepel, malgré les conditions sanitaires qui envahissent et paralysent notre quotidien. Comme vous l’a expliqué précédemment Monalisa, c’est grâce à l’organisation de nos chers professeurs, notamment Madame Blanc, que nous avons eu l’opportunité de le rencontrer.
Monalisa ainsi que moi-même avons décidé de vous faire partager notre expérience au travers de nos articles publiés sur Maulnews. Cela permettra aux curieux de Terminale, n’ayant pas choisi la spécialité HGGSP, de découvrir ce domaine, mais aussi aux élèves de Première qui étudient la spécialité de se décider quant à leur avenir dans cette sphère géopolitique, et aidera également les maulniens de Seconde dans leurs choix de spécialité.
GILLES KEPEL ET SES OUVRAGES
Gilles Kepel est un politologue et islamologue spécialisé dans le Moyen-Orient. Grand observateur du Monde Arabe Contemporain, il se penche aussi sur les question du développement de l’Islam et des mouvements islamistes actuels en Europe, plus précisément en France.
Nombreux sont les livres de Monsieur Kepel, néanmoins, dans le cadre des guerres irrégulières qui s’inscrivent dans le thème : Faire la guerre, faire la paix, nous pouvons retenir les livres ci-dessous :
- Jihad : expansion et déclin de l’islamisme, 2000.
- Al-Qaïda dans le texte, 2005.
- Terreur dans l’Hexagone. Genèse du djihad français, 2015.
- Sortir du chaos. Les crises en Méditerranée et au Moyen-Orient, 2018.
- Le prophète et la pandémie. Du Moyen-Orient au djihadisme d’atmosphère, 2021.
LE DÉROULÉ DE L’INTERVENTION DE GILLES KEPEL
Monsieur Kepel commence par faire un rappel des faits. En effet, il a théorisé quatre phases du djihad : la première concerne le djihad afghan, la deuxième l’émergence d’Al-Qaïda, la troisième celle de DAECH et la quatrième serait celle que nous traversons aujourd’hui et constituerait un tout nouveau cycle avec la présence croissante d’Internet. Or, comme nous l’explique le politologue, cette dernière phase ouvrirait selon lui sur un « djihadisme d’atmosphère ». Il explique ce récent concept comme désignant le fait qu’aujourd’hui, nous sommes confrontés à des djihadistes n’appartenant à aucun réseau. Il illustre cela par l’auteur de l’assassinat du professeur Samuel Paty ou encore par l’attaquant au hachoir de Paris, lesquels ne faisant partie d’aucun groupe terroriste. Cette atmosphère à laquelle il fait allusion serait fondée par ce qu’il appelle des « entrepreneurs de colère ». D’ailleurs, il explique cela dans son dernier livre Le Prophète et la Pandémie, sorti le 11 février 2021.
Il développe en expliquant ce que signifie le djihad. Il parle d’un « djihad individuel » concernant « les efforts que font les musulmans pour être pieux », puis d’un « djihad sociétal », lorsqu’il s’agit de « défendre l’Islam, en ayant pour intention d’étendre le territoire de l’Islam ». Il fait ensuite une distinction entre le « djihad défensif » et le « djihad offensif ». Le premier serait une « obligation individuelle », le deuxième viserait la « conquête de territoires ».
Gilles Kepel poursuit et revient à plusieurs reprises sur les multiples attentats terroristes qui se sont déroulés sur le sol occidental, depuis le 11 septembre 2001, suite à quoi George W.Bush avait décidé de mener « la guerre contre le terrorisme ». Il ajoute également que le département des Alpes Maritimes a été le deuxième, après celui de Seine-Saint-Denis, pour l’envoi de djihadistes en Syrie.
Spécialisé dans le Middle East, il évoque la région de la Palestine, de nos jours divisée entre l’État d’Israël et l’État Arabe, et qui fait l’objet de violents conflits entre le peuple juif et le peuple arabe qui se disputent tous deux un même territoire, et ce depuis la déclaration de la création de l’État israélien par David Ben Gourion, bien que les tensions remontent à l’année de 1917. D’abord appelé « israélo-arabe », le conflit est rapidement devenu un conflit israélo-palestinien avec pour principales dates 1947, 1948, 1956, 1967 et 1973.
UNE CHRONOLOGIE POUR RÉVISER VOTRE COURS
- 29 novembre 1947 : l’ONU propose un plan de partage de la Palestine, offrant à la fois un territoire aux juifs et aux arabes, en faisant de Jérusalem une zone internationale.
- 14 mai 1948 : David Ben Gourion dirigeant de la communauté juive de Palestine créé l’État d’Israël.
- 29 octobre – 7 novembre 1956 : période de crise du canal de Suez, avec le panarabisme, appelé aussi le « nassérisme », – en référence au nationaliste égyptien Gamal Abdel Nasser, désireux de réunir les peuples arabes – qui s’opposa au sionisme, idéologie visant à regrouper les juifs du monde entier dans un État, créée par Theodor Herzl dans un contexte d’antisémitisme, on le voit avec l’affaire Dreyfus en France, à la fin du XIXe siècle.
- 5 juin – 10 juin 1967 : se déroule la guerre des six jours, à la suite du blocus du détroit de Tiran aux navires israéliens par l’Égypte. Cette guerre opposa l’Égypte, la Jordanie et la Syrie à Israël.
- 6 octobre – 24 octobre 1973 : la guerre du Kippour, aussi appelée « guerre du Ramadan » en raison du contexte religieux, voyant se faire face une coalition menée par l’Égypte et la Syrie à Israël.
QUELQUES QUESTIONS À GILLES KEPEL
Que devient la filière d’Artigat ?
Gilles Kepel nous dit que la filière est toujours active et qu’elle n’a toujours pas été démantelée. Elle est cependant sous-surveillance accrue.NB : La filière Artigat est en fait une filière djihadiste située en Occitanie, et dirigée par Olivier Corel. Ce dernier, naturalisé français, est un islamiste radical syrien, né Abdel Ilah Al-Dandachi et surnommé l’« Émir Blanc ». Il est connu pour avoir été le mentor de nombreux djihadistes français, notamment de Mohammed Merah qui a été formé au sein de la communauté d’Artigat.
D’où vient ce dégoût envers la France ?
L’islamologue nous explique que la France est un symbole de liberté et de laïcité, et que par conséquent, elle abrite de nombreuses religions mais tolère aussi l’athéisme. Elle regroupe toute les valeurs démocratiques. Pour ces raisons, il existe une haine de la France et une volonté de détruire ces idéaux et les infidèles. Si les djihadistes parviennent à faire tomber la France entre leurs mains, ils déclencheront aussi la chute des autres démocraties européennes, car considérées comme moindres.
Que pensez-vous du projet de loi contre le « séparatisme » examiné actuellement par l’Assemblée ?
Gilles Kepel affirme que ce projet de loi traite « un défi réel ». Selon lui, cette loi a pour objectif de « lutter avec anticipation […] en asséchant le terrain sur lequel [le terrorisme] peut se développer ». Il poursuit en expliquant l’importance et l’utilité de cette loi, à savoir qu’elle permettrait de « renforcer la sécurité et le combat contre l’islamisme ».
Gilles Kepel et quelques rédactrices de Maulnews, 16 février 2021.
J’ai voulu connaître l’avis de mon professeur de géopolitique quant à la conférence tenue par Gilles Kepel. Monsieur Gauthier m’a alors dit avoir apprécié son intervention. Gilles Kepel lui a semblé « très accessible, très ouvert », celui-ci ayant répondu à « un large panel de questions ».
MERCI GILLES KEPEL !
Moon